CHAOUKI-LI-QACENTINA

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Il y a 25 ans, l’assassinat de Boudiaf

Qui se souvient de Si Tayeb El Watani ?


Annaba, le 29 juin 1992, 11h30. Le temps s’est arrêté soudainement à la maison de la culture de la ville. Le président du Haut-Comité d’Etat, Mohamed Boudiaf, vient d’être assassiné. Son meurtrier, Mbarek Boumaârafi, l’un de ses gardes du corps, a été arrêté. L’histoire s’arrêtera là. Boudiaf sera enterré pour être oublié. Vingt-cinq ans après, jour pour jour, qui se souvient encore de Si Tayeb El Watani ? Ce nom dit-il quelque chose à la jeune génération des années 1980, 1990 et 2000, alors qu’il avait été mis aux oubliettes durant 28 ans, le temps d’un long exil ?

Mohamed Boudiaf, éphémère chef d’Etat pour une durée de 165 jours, soit la plus courte dans l’histoire de l’Algérie, est né à M’sila en 1919. Peu connu sur la scène nationale lors de son retour en Algérie, le 16 janvier 1992, Boudiaf est pourtant un héros de la lutte pour l’indépendance. Il s’est engagé très tôt, en 1950, au sein de l’Organisation secrète, branche armée du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques. Recherché par la police française, il mène une vie clandestine.

Il est l’un des membres du Comité révolutionnaire pour l’unité et l’action (CRUA), futur FLN, qui déclenchèrent l’insurrection de novembre 1954. Il sera l’un des initiateurs de la réunion des 22 qui aboutira à la rencontre des six chefs historiques du FLN, le 24 octobre 1954, à l’issue de laquelle seront fixées la date du déclenchement de la Révolution, la répartition géographique et les affectations des responsables des zones.

Boudiaf sera choisi comme coordonnateur. Il sera arrêté et incarcéré le 22 octobre 1956 avec Ben Bella, Mohamed Khider, Mostefa Lacheraf et Hocine Aït Ahmed, lors du détournement du DC3 qui les transportait de Rabat vers Tunis. Libéré au cessez-le-feu, il sera contraint de quitter le pays après des dissensions avec Ben Bella. L’histoire basculera suite à l’interruption du processus électoral, après le premier tour des législatives du 26 décembre 1991, et le raz-de-marée du FIS, avec le risque de l’arrivée au pouvoir des intégristes. Après la démission de Chadli Bendjedid, Boudiaf sera appelé à diriger un pays en proie à une guerre civile.

La fin tragique de Mohamed Boudiaf marquera pour longtemps la génération des années 1990, celle qui a vécu aussi la décennie du terrorisme. Elle marquera aussi l’histoire philatélique algérienne, où Si Tayeb El Watani sera aussi le premier chef d’Etat assassiné porté sur un timbre-poste. Il faudra attendre la célébration de l’anniversaire de la Révolution de Novembre pour voir la parution d’une série de deux timbres à sa mémoire émis le 1/11/1992, soit 125 jours après sa mort.

Sur les deux figurines réalisées par Sid-Ahmed Bentounès, on voit le portrait présidentiel «officiel», d’un homme posant devant l’emblème national, sur un fond noir. Habillé en costume noir trois-pièces à rayures, chemise blanche, et cravate à bandes bleues et rouges, Boudiaf avait le regard d’un homme sincère, au caractère paisible. Sur les deux timbres, on pouvait lire sur la partie supérieure «Le président Mohamed Boudiaf – 1919-1992», et en bas, sa fameuse expression «L’Algérie d’abord et avant tout».

Cette série est la troisième du genre pour un chef d’Etat algérien, après celles consacrées au défunt président Houari Boumediène, où un premier timbre fut émis le 5/1/1979 d’après photo, une semaine après son décès le 29/12/1978, et un second à son effigie, dessiné par Mohamed Temmam, paru le 2/2/1979, à l’occasion du 40e jour de sa disparition.

Ces trois timbres sont à ce jour les seuls à porter les portraits de présidents algériens décédés. Trois autres anciens chefs d’Etat, Ahmed Ben Bella, Chadli Bendjedid et Ali Kafi, ayant tous tiré leur révérence, sont toujours sur la liste d’attente. Pourtant, Rabah Bitat, un des six chefs du FLN, ancien président de l’APN, et président par intérim après la mort de Boumediène, avait fait l’objet d’un timbre émis le 29/12/2004.

On retrouvera par ailleurs Mohamed Boudiaf dans un second timbre, émis le 1/11/2004 à l’occasion du 50e anniversaire de la Révolution, dessiné par Sid-Ahmed Bentounes, illustré par la célèbre photo prise chez un photographe à Alger, le dimanche 24/10/1954, réunissant les six chefs du FLN (Bitat, Benboulaïd, Didouche, Boudiaf, Krim et Ben M’hidi) à l’issue de l’ultime réunion avant le déclenchement de la Révolution. Ce sera aussi le dernier timbre réunissant des personnalités historiques de la Guerre de Libération. 

Par/Arslan Selmane

El Watan



30/06/2017
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