CHAOUKI-LI-QACENTINA

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BIEN QUE L’AÏD SE SOIT VIDE DE SON ESSENCE AVEC LE TEMPS


                                                              Photo : S. Zoheir

   La frénésie d’achat perdure à Constantine

Les constantinois envahissent les différents magasins de vente à quelques jours des fêtes de l’Aïd el Fitr. C’est la deuxième dépense qui se fera sentir dans les budgets des ménages.

Les habits pour enfants restent onéreux, même quand c’est une production locale. D’autres estiment que les meilleurs vêtements d’importation sont inaccessibles pour les bourses moyennes. L’équilibre est difficile à assurer chez une famille nombreuse. Et la tradition imposée par la cérémonie semble avoir cédé à la métamorphose du temps.

 L’Aïd est un autre générateur de dépenses intenses pour les familles algériennes en raison de ses spécificités «vestimentaires» et culinaires. Les derniers jours du mois sacré contraignent encore les ménages via les marchés à puiser au fond de leur escarcelle pour boucler la trentaine. Et le compte à rebours pour les achats est enclenché à Constantine depuis presque une semaine. Le consommateur édicte instinctivement l’autre «mercuriale» alors qu’il subit fraîchement l’inflation. La furie dans les marchés est accentuée par la phobie de louper son shopping en perspective du jour J. Le panorama se distingue de celui des années antérieures par une ambiance caractéristique au siècle. Le tempo. La ruée vers les souks. La surenchère. Au point de pirouetter la cérémonie, qui jaillissait autrefois dans chaque foyer avec un strict minimum de produit, mais avec beaucoup de joie, synthétisant l’essence de la communion en pareil évènement. «Ce fût un temps… Les choses ont changé», admet une âgée. Les espaces de ventes commencent à recevoir autant de monde notamment pendant la soirée. Les échoppes spécialisées en vêtements d’enfants sont naturellement les plus prisés. Le client accélère la cadence, et met en éveil les négociants qui n’hésitent pas à empiler leurs étals en divers articles. L’informel de l’autre côté se maintient grâce à cette tolérance du mois. Certains parents anticipent sur des achats pour éviter les courses endiablées et infructueuses de dernière minute. Comme il existe une catégorie de foyers qui préfèrent attendre les derniers jours pour vêtir en neuf leurs bambins. «Nous nous sommes habitués à des baisses sensibles dans les coûts pendant les ultimes dates», dira une mère en visite dans un espace à la nouvelle ville Ali-Mendjeli. Une autre maman à la recherche d’habits pour sa fillette de huit ans estimera cependant que les prix demeurent négociables, selon la bourse de chacun. D’autant que certains magasins ont activé le plan  «liquidation» de stock d’été avec des ristournes alléchantes.

Mais gare à la gourmandise.

Ce n’est pas pour autant gagner aisément sa petite affaire.

«Les soldes ont été engagées il y a plusieurs jours dans quelques boutiques du prêt-à- porter. En revanche les rabais ne concernent pas les vêtements les plus prisés. Donc c’est un hameçon à la limite du mensonge», alerte un père. Sauf que cette année, de l’avis des parents que l’on a questionnés aux abords les magasins : les habits pour enfants enregistrent des marges «tolérables», notamment

ceux fabriqués localement.

Les bourses moyennes ont de quoi habiller leur progéniture d’un ensemble «made in algeria», et avec un coût abordable moyennant les 2500-3000 DA. Deux mille de plus et l’on acquerra un assortiment venu d’Istanbul. «Cette robe vaut 5 400 DA. Ce n’est pas Chinois ça vient de Turquie. Je pourrais vous la céder à 5 000 DA rond», tentait de nous appâter un marchand au niveau du marché de Sidi-Mabrouk. Un calcul sans effort illustre une faille dans le budget : un père qui a trois enfants et frôle le Smig pourrait se ruiner non pas avec cette griffe turque qui inonde les souks constantinois à la faveur des importations massives. Mais le label national est aussi cher pour certains ménages à portefeuilles limités et qui ne savent plus où donner de la tête. Ils peinent à terminer ce mois de jeûne sans avoir entaché une quelconque ardoise en dinars.

«C’est difficile. Avec la dégradation du pouvoir d’achat le simple citoyen paye toujours les ‘bévues’ économiques. On n’a pas bouclé le mois et on s’est endetté. Pour l’Aïd il faudra trouver des solutions pour satisfaire tous ses enfants», lâche amèrement un sexagénaire. L’Ugcaa, qui tentait depuis le début du mois béni de raisonner son réseau de boutiquiers pour «arranger» la population ne pourra convaincre la loi du marché. Où plutôt les marges bénéficiaires «fictives» en l’absence de beaucoup de paramètres dont les factures d’achats, rarement dévoilées. Cela étant l’autre face cachée du commerce formel ! Un seul déplumé le père de famille. Allier effets vestimentaires et confiseries ancestrales s’avère une terrible équation pour les bourses moyennes. Là aussi les temps ont changé. Mais sans pour autant évoquer le degré de pouvoir d’achat. La plupart des foyers ont renoncé à la préparation de recettes traditionnelles avec la prolifération de femmes et hommes se constituant en spécialistes, venant pallier cette «déficience» intra maison faute de temps pour surtout les nouveaux couples du XXIe à cause des métamorphoses subies, toujours au temps. Khobz Eddar, gâteaux, galettes, Rfis,…Tout se commande et tout s’épuise à la veille des fêtes au grand bonheur de ces suppléants «cordons bleus» qui aplanissent les cuisines constantinoises. Malgré cela Cirta s’accroche un tant soit peu à ses traditions. A l’image de cette jeune fille qui récuse toute confection hors de sa cuisine. «Une femme qui est née en plein cœur de la vielle médina ne pourra commander pain de maison ou autre chose…», a-t-elle lancé fièrement.

Quoiqu’il en soit l’évidence saute aux yeux. Les nombreux plateaux sur la tête ou entre les bras portés par les jeunes ou grands à destination des boulangeries de la ville se font rares.

La spéculation et l’inflation viennent suppléer indélicatement à leur manière ce que le temps a vraiment changé dans les courses et les us.         

Nasser Hannachi

03-08-2013

La Tribune d'Algérie



04/08/2013
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