CHAOUKI-LI-QACENTINA

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Hommage officiel aux martyrs sur les timbres-poste

Enfin, on peut crier «Al Hamdulillah !»


On l’a attendu durant des décennies. Comme on attend un bébé dans l’espace à l’âge de 80 ans, ou une météorite venue de la galaxie GN-z11 née 400 millions d’années après le big bang. Pourtant, l’événement qui devait l’être, car il s’agissait bel et bien d’un événement de taille, est passé dans la discrétion totale, presque dans l’anonymat.

Même pas une annonce officielle ni officieuse, comme si on préparait dans le secret une formule chimique de l’eau bouillante.

Heureusement qu’il y avait cette belle invention qu’est Facebook. C’était le 30 octobre dernier. Après un long périple «philatélique» dans le Sahara algérien, depuis le plateau de la Tadrart, au sud-est du Tassili N’ajjer jusqu’à la vallée de la Saoura, en passant par le magnifique Hoggar, le majestueux M’zab et les belles oasis du Touat et du Gourara, en compagnie de notre guide, Messaoud, caravanier à la retraite et grand connaisseur des déserts, nous recevons un appel de Haddada, dans la wilaya de Souk Ahras, à l’autre bout de l’Algérie.

Notre ami Mohamed Achour Ali Ahmed nous apprend la bonne nouvelle, encore chaude et croustillante. Algérie Poste allait émettre une série de timbres en hommage à cinq martyrs de la Révolution. On n’en revenait pas.

On avait envie de crier dans toutes langues «Al Hamdulillah ya rabbi» (Louange à Dieu) dans ce beau site de Kerzaz, à 300 km de Béchar et à 1265 à km du siège d’Algérie Poste, puis aller faire une grande «waâda» à la zaouïa de Sidi Ahmed Ben Moussa pour commémorer cette heureuse naissance.

Si le Cardinal M’hamed El Anka était vivant, il aurait composé une nouvelle chanson. Un sentiment de délivrance difficile à décrire jaillit comme du pétrole dans ce vaste désert où nous étions. Une grande joie, après des années d’attente et des demandes adressées au président Bouteflika en personne. Enfin, le ministère des Moudjahidine vient de rompre un long débat byzantin et briser un tabou «historique» en accordant «sa sainte bénédiction» au ministère de la Poste pour libérer une émission de cinq vignettes, 56 ans après l’indépendance.

Un délit d’amnésie que nous avions dénoncé dans une précédente chronique consacrée à cette «sortie ratée», prévue pourtant pour la célébration de la Journée du chahid, le 18 février dernier. Un faux lapin posé aux collectionneurs de timbres privés de programme philatélique et qui avait fait le buzz sur les réseaux sociaux.

Presque neuf mois après, un temps suffisant pour faire un enfant, l’émission verra enfin le jour, lors d’une naissance pénible, faute de gynécologue au service philatélique d’Algérie Poste. C’est la première fois aussi que des personnalités historiques sont réunies «symboliquement» dans une émission de timbres-poste, alors qu’ils l’ont été rarement de leur vivant.

Il s’agit de vignettes dessinées par Ali Mechta, sorties le 1er novembre dernier à l’occasion du 64e anniversaire de la Révolution et illustrant des portraits de Mustapha Benboulaïd (1917-1956), Didouche Mourad (1927-1955), Zighoud Youcef (1921-1956), Larbi Ben M’hidi (1923-1957) et Amirouche (1926-1959).

Finalement, le rendez-vous historique tant attendu a eu lieu. Côté illustration, il n’y avait rien de révolutionnaire. Le dessinateur Ali Mechta s’est contenté de reprendre les célèbres photos d’identité ou les rares photos prises au maquis et exposées dans tous les musées de l’Algérie. Il ne pouvait faire autrement.

A l’époque, les chefs historiques n’avaient ni le temps ni les smartphones pour se prendre en selfie au djebel. Si le choix des figures n’est pas contestable, celui des régions risque de faire des remous. On notera que les zones, devenues wilayas après le Congrès de la Soummam étaient toutes représentées, sauf la Wilaya IV historique.

Ce qui risque vraiment de fâcher les anciens maquisards de cette région. La question demeure posée. L’on peut s’interroger sur l’absence d’au moins deux chefs martyrs. On citera Si M’hamed Bouguerra (1928-1959), plus connu par le «martyr sans sépulture», et Djilali Bounaâma (1926-1961), qui prendra les commandes de cette wilaya en 1961.

Cela donnera à réfléchir aux décideurs dès maintenant pour les prochaines émissions. Même si les martyrs de la Révolution ne sont pas tenus de faire des demandes à Bouteflika et d’attendre encore les célébrations officielles pour avoir droit à un hommage mérité qui a trop tardé.

Par/ Arslan S.

El Watan



22/11/2018
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