CHAOUKI-LI-QACENTINA

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Image de la femme sur les timbres algériens (deuxième partie et fin)

De belles choses, malgré tout

Il y a bien des choses curieuses qui interpellent lorsqu’on fouille dans le catalogue philatélique algérien à la recherche des représentations de la femme sur les timbres- poste. D’abord, c’est l’image classique de la femme artisane devant son métier à tisser qui marque le milieu des années 1960, avec cette vignette réalisée par Ali Khodja.

Cette artisane, douée et ingénieuse, est aussi vannière et fileuse, mais 15 ans plus tard, dans la série «Arts traditionnels» de Bachir Yelles. Il est désormais admis que c’est le patrimoine culturel et traditionnel qui a réuni ces belles facettes, dont la femme algérienne demeure l’un des acteurs les plus actifs. Des images que le dessinateur Sid-Ahmed Bentounes a regroupées dans les trois émissions des danses folkloriques sorties en 1986, 1994 et 1999, illustrant toute la beauté de la femme kabyle et celle de la femme de la région des Ouled Naïl. On découvre également la femme algéroise portant majestueusement son magnifique costume et la femme constantinoise dansant le «zendali», habillée de sa belle gandoura traditionnelle, ainsi que la femme chaouie avec sa légendaire melhfa.

Un retour s’impose, quand même, vers cette époque charnière des années 1970, où une sacro-sainte tradition philatélique faisait que la femme soit un élément indispensable dans les innombrables vignettes commémoratives des événements marquants dans l’histoire de l’Algérie. Une tradition qui sera perpétuée au fil des années, durant lesquelles on retrouvera ces femmes algériennes en haïk ou en tenue moderne, sorties manifester le 17 Octobre 1961, à Paris, le 11 Décembre 1960, à Alger, le 12 Février 1962, à Ouargla, le 19 Mars 1962, et le jour de l’indépendance, le 5 juillet 1962. L’image de la femme, qui a conquis divers secteurs, revient également à l’occasion de la Fête de la police, la Journée de l’étudiant et la Journée de la femme rurale.

Et puis, on n’oubliera pas de marquer une halte à cette époque des années 1980 et le boom démographique à l’origine de la fameuse planification familiale, où la femme sera la cible principale des campagnes de vulgarisation pour l’espacement des naissances, l’allaitement maternel et la lutte contre la mortalité infantile. Des messages portés par une série dessinée par Kamreddine Krim, émise le 3/10/1985. Il faut tout de même noter qu’en 56 ans et une soixantaine d’émissions depuis l’indépendance à ce jour, et malgré l’évolution remarquable du statut de la femme en Algérie, on ne la voit pas sur les vignettes postales comme chercheuse, médecin, député, sénateur, avocate, ou même pilote d’avion. Il a fallu quand même attendre l’année 1988 pour assister à l’émission du premier timbre consacré à la Journée internationale de la femme, réalisé par Qamreddine Krim.

Le sujet reviendra régulièrement dans les programmes philatéliques grâce à d’autres dessinateurs comme Tahar Boukeroui, auteur, en 1992, du timbre «La femme algérienne à travers l’histoire».

En 1998, Qamreddine Krim reviendra pour signer un timbre en hommage à Lalla Fadhma N’soumer, la première femme qui a mené la résistance contre les généraux de l’armée française. Malheureusement, il choisira le dessin allégorique aux dépens du portrait de cette héroïne, qui n’a jamais été illustrée sur aucun timbre jusqu’à ce jour. L’unique présence féminine dans ce 8 mars sera celle de Ghania Ammour, qui dessinera le timbre consacré à cet événement en 2004.

La Poste choisira une autre manière pour rendre hommage aux femmes, en portant sur deux timbres émis le 25/12/1996, les célèbres toiles d’Ismaïl Samsom, «Femme aux pigeons» et «Interrogations». Un geste aussi pour tirer ce grand artiste de l’oubli.

En parlant d’hommages, les honneurs rendus aux femmes artistes tarderont à voir le jour. Elles ne seront que trois à figurer sur les tablettes des commémorations de la Journée nationale de l’artiste. La première sera l’artiste-peintre Baya Mahieddine, dont le portrait sera le sujet d’un bloc feuillet paru en 2008, suivi en 2017 de deux timbres consacrés aux deux figures emblématiques de la chanson algérienne, la diva Fadila Dziria et la grande Warda El Djazaïria. Dans la culture populaire, l’image de la femme reste omniprésente dans le conte.

C’est le sujet développé intelligemment par Ali Kerbouche, qui réalisera une série jusque-là inédite, consacrée en 2009 aux contes, où l’on retrouve «Loundja fille de l’ogre», «Badra», «La fée colombe» et «La rose rouge». Le même Kerbouche sera l’auteur de deux timbres sur le légendaire haïk et l’immortelle melaya en 2014.

La déception chez les philatélistes s’est manifestée suite à l’émission, en 2017, du timbre dessiné par Zineb Bahri, consacré aux bijoux de Tin Hinen, alors qu’il aurait été plus judicieux de mettre en exergue le portrait de cette grande dame, mère des Touareg. C’était un autre rendez-vous manqué, en dépit de toutes les belles choses qui marqueront cette thématique féminine.

Par/Arslan Selmane

El Watan



05/04/2018
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